Que doivent être les codes des investissements Ouest-Africains à l’épreuve de la mondialisation ?

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Partons des postulats suivants :

  1. Avec la mondialisation, le client devient véritablement roi en ce sens qu’il a la possibilité de choisir entre les biens et services proposés par les entreprises du monde entier ;
  2. Les entreprises du monde entier sont donc dans une concurrence internationale sans merci ;
  3. Elles sont obligées d’avoir le maximum de débouchés à l’international pour tirer leur épingle du jeu ;
  4. De façon stratégique, elles sont  »condamnées » à être le plus proche du maximum de clients à travers des délocalisations ou des créations de filiales dans les pays étrangers ;
  5. Elles sont aussi  »condamnées » à vendre au plus bas prix que possible afin de rester compétitives ;
  6. L’Afrique, surtout ouest-africaine est l’une des parties du monde où la clientèle reste encore à conquérir ;
  7. De ce fait les états n’ont plus à séduire les entreprises internationales en leur octroyant des avantages fiscaux aussi énormes ;
  8. Nos Etats redeviennent les maîtres du jeu et peuvent même réclamer un droit d’installation et d’exercice sur leur territoire aux multinationales.

Introduction : La mondialisation et ses défis pour l’Afrique de l’Ouest

La mondialisation a bouleversé les règles économiques à l’échelle mondiale. Elle a créé un marché global où les entreprises et les consommateurs interagissent au-delà des frontières, mettant en concurrence les entreprises du monde entier. Cette situation a des répercussions directes sur les stratégies économiques des États, en particulier ceux de l’Afrique de l’Ouest, qui cherchent à attirer les investissements étrangers tout en protégeant leurs intérêts nationaux.

La mondialisation place le client dans une position de pouvoir : celui-ci peut désormais choisir entre des biens et services venant du monde entier, accentuant la pression concurrentielle sur les entreprises. Les multinationales, pour rester compétitives, n’ont d’autre choix que de s’adapter en se rapprochant des consommateurs par la délocalisation ou la création de filiales, tout en maintenant des prix bas. Dans ce contexte, l’Afrique, et en particulier l’Afrique de l’Ouest, devient une zone stratégique à conquérir pour ces entreprises en quête de nouveaux débouchés.

Cependant, cette compétition mondiale ne signifie plus nécessairement que les États ouest-africains doivent se plier aux exigences des entreprises en leur offrant de généreux avantages fiscaux. Au contraire, ces États peuvent désormais tirer parti de leur position pour repenser leurs codes des investissements, en mettant l’accent sur des stratégies qui maximisent les bénéfices pour leurs économies locales tout en répondant aux besoins des entreprises mondiales.

Les opportunités offertes par la mondialisation : un rééquilibrage des forces

L’un des changements majeurs induits par la mondialisation est la redéfinition des rapports de force entre les entreprises internationales et les États. Alors qu’autrefois, ces entreprises avaient le dessus, bénéficiant de privilèges fiscaux conséquents pour s’installer, la situation actuelle est différente. La concurrence mondiale oblige les multinationales à rechercher de nouveaux marchés et à être plus présentes dans des zones encore sous-exploitées comme l’Afrique de l’Ouest. Cela place les États de la région en position de force.

En effet, la forte croissance démographique et le dynamisme économique en Afrique de l’Ouest en font une région où la demande de biens et services est en plein essor. De ce fait, les entreprises internationales sont plus enclines à s’installer dans cette partie du monde, même sans incitations fiscales démesurées. Les États ouest-africains n’ont donc plus à séduire les multinationales à tout prix. Ils peuvent désormais poser leurs conditions et exiger des contreparties significatives pour le développement de leurs économies locales.

En résumé, la mondialisation redéfinit les règles du jeu. Les États ouest-africains doivent voir dans cette dynamique une opportunité pour attirer des investissements étrangers et pour conditionner ces investissements à des bénéfices tangibles pour leurs populations et leur développement économique.

Vers une refonte des codes des investissements : les bases d’une nouvelle approche

Face à cette nouvelle réalité, il devient indispensable de repenser les codes des investissements des pays ouest-africains. Ceux-ci ne doivent plus simplement chercher à attirer des capitaux étrangers, mais aussi à garantir que ces investissements contribuent au développement économique et social local. Il faudra ainsi aller vers :

  1. Un changement de perspective : vers un code de compétitivité

Les codes des investissements traditionnels ont souvent pour seul objectif d’attirer les entreprises étrangères en offrant des incitations fiscales attractives. Or, dans un contexte de mondialisation, ces incitations ne suffisent plus. Les États ouest-africains doivent désormais se doter d’un « code de compétitivité », qui ne se contente pas de favoriser les investissements, mais qui vise à rendre leur économie plus compétitive à l’échelle internationale.

Ce code de compétitivité devrait inclure des politiques qui renforcent l’attractivité globale des économies ouest-africaines, notamment par l’amélioration des infrastructures, la simplification des procédures administratives, et l’investissement dans la formation d’une main-d’œuvre qualifiée.

  1. Des avantages fiscaux ciblés et conditionnés

Les incitations fiscales accordées aux entreprises doivent être conditionnées à des résultats concrets et mesurables. Plutôt que d’offrir des exonérations fiscales à toutes les entreprises qui s’installent, les États devraient exiger des contreparties telles que :

        • La création d’emplois qualifiés pour les populations locales ;
        • L’innovation technologique ;
        • La réduction des importations de biens de consommation au profit de la production locale.

Ainsi, seules les entreprises qui apportent une réelle valeur ajoutée à l’économie ouest-africaine devraient bénéficier de ces avantages fiscaux.

  1. L’utilisation d’indicateurs de résultats

Il est essentiel de mettre en place des mécanismes d’évaluation basés sur des indicateurs de résultats, et non de moyens. Par exemple, les exonérations fiscales ne devraient être accordées qu’à des entreprises ayant prouvé leur impact sur l’économie locale, que ce soit par la création d’emplois, l’augmentation des exportations ou l’innovation.

Ces indicateurs permettraient d’éviter que des entreprises ne bénéficient indûment d’avantages fiscaux sans apporter de réels bénéfices à la région.

  1. La limitation des bénéficiaires

Tous les secteurs économiques ne doivent pas être traités de la même manière. Les avantages fiscaux devraient être réservés à des secteurs stratégiques, comme l’industrie manufacturière ou les start-ups technologiques, qui sont moteurs d’innovation et de création d’emplois. Par exemple, une entreprise qui se contente d’importer et de revendre des produits étrangers ne devrait pas bénéficier des mêmes incitations qu’une entreprise manufacturière qui exporte et contribue à la balance commerciale du pays.

De plus, les entreprises doivent être encouragées à investir dans des secteurs qui renforcent l’autonomie économique des États ouest-africains, tels que l’agriculture, les énergies renouvelables, et la transformation industrielle.

  1. La stimulation de l’investissement productif

L’objectif final des codes des investissements doit être de stimuler l’investissement productif, c’est-à-dire des investissements qui génèrent des emplois durables et de qualité, favorisent l’innovation et renforcent la compétitivité de l’économie locale.

Par exemple, les entreprises devraient être encouragées à investir dans la recherche et le développement (R&D) et à participer activement à la formation de la main-d’œuvre locale. Des partenariats avec les universités locales pourraient être encouragés pour favoriser le transfert de compétences et le développement technologique.

Conclusion : Une stratégie gagnant-gagnant

La mondialisation, bien que source de défis, offre également une opportunité unique pour les États ouest-africains de repenser leurs politiques d’investissement. En adoptant un « code de compétitivité » qui conditionne les avantages fiscaux à des résultats concrets, les États peuvent attirer des investissements qui contribuent réellement à leur développement économique et social.

Cela leur permettrait de se positionner comme des acteurs compétitifs sur la scène mondiale, tout en maximisant les retombées positives pour leurs économies locales. Les entreprises, quant à elles, trouveraient dans cette approche une région stable, dynamique et favorable à l’innovation, leur offrant un accès privilégié à un marché en pleine croissance. C’est donc une stratégie gagnant-gagnant qui doit être mise en place pour garantir un avenir prospère à l’Afrique de l’Ouest.

Inspecteur des impôts


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