Le SYCEBNL, ce qu’il faut savoir !

Lors de la session du conseil des ministres de l’OHADA à Niamey les 21 et 22 décembre 2022, une avancée majeure a été réalisée dans le domaine de la comptabilité pour les entités à but non lucratif (EBNL) avec l’adoption de l’acte uniforme relatif au système comptable des entités à but non lucratif (SYCEBNL). Cette initiative novatrice vise à doter les EBNL d’un cadre comptable dédié, à l’instar des entités à but lucratif, et à harmoniser les pratiques comptables à travers l’espace OHADA.

Le SYCEBNL, entré en vigueur le 1er janvier 2024, marque une étape déterminante vers la transparence et la rigueur financière au sein des organisations à but non lucratif. Ce nouvel acte uniforme apporte des solutions adaptées aux spécificités des EBNL, permettant ainsi une gestion plus efficiente et une meilleure comparabilité des états financiers.

Dans cet article, nous vous proposons de découvrir les éléments essentiels du SYCEBNL. Nous aborderons son champ d’application, les états financiers requis, les particularités techniques, ainsi que les obligations de contrôle instaurées par cette nouvelle réglementation.

QUI SONT CONCERNES PAR LE SYCEBNL ?

Le SYCEBNL, en tant que nouveau standard comptable au sein de l’espace OHADA, impacte diverses entités à but non lucratif, créant ainsi un paysage financier plus transparent et uniformisé.

Les associations, fondations, fonds de dotation et autres entités similaires se voient désormais régis par le SYCEBNL. Ces organisations, animées par des missions philanthropiques, éducatives ou sociales, bénéficieront d’une structure comptable dédiée qui reflète fidèlement leurs activités et leurs objectifs, tout en renforçant leur responsabilité financière envers leurs membres et la société dans son ensemble.

Les ordres professionnels, émanations de professions libérales telles que les experts-comptables, les avocats, les médecins et les notaires, se trouvent également concernés par le SYCEBNL. En adoptant ce nouveau système, ces institutions renforcent leur gouvernance interne et leur transparence financière, éléments essentiels pour maintenir la confiance du public et assurer l’intégrité de leurs professions respectives.

Les projets de développement, moteurs essentiels du progrès socio-économique, entrent également dans le périmètre du SYCEBNL. Que ce soit des initiatives financées par des bailleurs bilatéraux, multilatéraux, privés ou étatiques, ces projets visent à améliorer les conditions de vie des populations locales et à favoriser le développement durable. En adoptant le SYCEBNL, ces entités renforcent leur capacité à gérer efficacement les ressources financières et à rendre compte de manière transparente de l’impact de leurs actions.

En somme, le SYCEBNL représente une avancée majeure dans la régulation comptable des entités à but non lucratif au sein de l’espace OHADA. En adoptant ce nouveau standard, ces organisations s’engagent vers une gestion financière plus rigoureuse, une transparence accrue et une meilleure reddition de comptes, contribuant ainsi à une société plus juste et plus responsable.

QUELS SONT LES ETATS FINANCIERS A PRESENTER ?

La nature des états financiers requis varie en fonction du type d’entité à but non lucratif concernée, que ce soit une association, un ordre professionnel ou un projet de développement. Le SYCEBNL établit des normes précises pour chaque catégorie, visant à assurer une transparence financière optimale et une gestion rigoureuse des ressources.

Associations et ordres professionnels

Pour les associations et ordres professionnelles, les états financiers comprennent : le bilan, le compte de résultat, le tableau des flux de trésorerie et les notes annexes. Ces documents permettent de dresser un panorama complet de la situation financière et des performances de ces entités, facilitant ainsi leur évaluation par les parties prenantes.

Projets de développement

Pour les projets de développement : le tableau emplois-ressources, le tableau d’exécution budgétaire, le tableau de réconciliation de trésorerie, le bilan, le compte d’exploitation et les notes annexes. Ces documents spécifiques reflètent les particularités des projets de développement, notamment en ce qui concerne la gestion des ressources financières et l’évaluation de l’efficacité des actions entreprises.

Le bilan, le compte de résultat et le tableau des flux de trésorerie prévus par le SYCEBNL doivent quasiment respecter les mêmes principes que ceux prévus par le SYSCOHADA. Les nouveautés apportées, sont plutôt au niveau des autres états financiers, qui sont relatifs aux projets de développement.

Ainsi, le compte d’exploitation des projets de développement récapitule en liste, les charges sans amortissement, ni dépréciation et une quotité des ressources équivalant aux charges, pour que le solde des opérations de l’exercice soit nul.

Le tableau des emplois-ressources quant à lui, récapitule tous les emplois, les immobilisations et les charges, sans amortissement ni dépréciation ainsi que les fonds reçus des bailleurs.

Le tableau d’exécution budgétaire fait apparaitre le budget de l’exercice, les réalisations, les décaissements et les engagements non encore payés, le crédit disponible ainsi que le taux d’exécution du budget.

Par ailleurs, le tableau de réconciliation retrace les mouvements de trésorerie du début à la fin de l’exercice.

Les systèmes de présentation prévus par le SYCEBNL

Le SYCEBNL prévoit au même titre que les SYSCOHADA, deux systèmes de présentation des états financiers : le système minimal de trésorerie et le système normal.

Toute entité est, sauf exception près en fonction de sa taille, soumise au système normal de présentation des états financiers et de tenue des comptes.

Le système minimal de trésorerie est réservé aux petites entités. Par petite entité, il faut entendre celle dont les ressources annuelles suivantes, sont inférieures ou égales à 30.000.000 francs CFA :

  • les subventions,
  • les cotisations et autres revenus,
  • les dons et/ou legs,
  • les ressources du projet de développement,
  • ou les autres ressources.

Lorsqu’elle est soumise au SMT, l’EBNL présente uniquement le Bilan, le compte de résultat et les notes annexes.

Quel que soit le système utilisé, les états financiers doivent être établis en se basant sur une comptabilité tenue de manière régulière, conforme, intelligible et en prenant en compte les spécificités techniques apportées par le SYCEBNL. Cela garantit une présentation fidèle de la situation financière et des performances des entités à but non lucratif au sein de l’espace OHADA

 

SPECIFICITES COMPTABLES MAJEURES PAR RAPPORT AU SYSCOHADA

Bien que le SYCEBNL s’appuie sur les mêmes principes comptables que le SYSCOHADA, il introduit des spécificités techniques et des nouveautés essentielles, notamment en ce qui concerne le plan comptable des entités à but non lucratif :

  • La comptabilisation des ressources

Les EBNL se distinguent des entités à but lucratif par la nature de leurs sources de financement. Il devient évident alors, qu’il y ait des spécificités techniques dans la comptabilisation de leurs ressources. Le SYCEBNL prévoit dans l’annexe de l’acte uniforme ainsi que dans son guide pratique, le traitement des fonds propres, des dons, des subventions et des cotisations.

 

  • Les comptes de tiers

Bien que le SYCEBNL a repris beaucoup de compte de tiers du SYSCOHADA, il a adapté certains comptes de tiers du SYSCOHADA pour mieux refléter les réalités des EBNL. On note par exemple le changement de l’intitulé des comptes tels que le 411 « Adhérents », le compte 45 « Fondateur, apporteur et comptes courants », le compte 46 « Bailleurs, Fonds d’administration » pour permettre aux EBNL de tenir compte de toutes les parties prenantes participant à leurs activités.

  • La classe 9

Le SYCEBNL innove en subdivisant la classe 9 en deux parties distinctes :

Comptes 90 et 91 : Contributions volontaires en nature

  • Compte 90 « Emplois des contributions volontaires en nature » et Compte 91 « Contribution volontaire en nature » : ces comptes concernent les contributions volontaires en nature, qui ne répondent pas à la définition d’un actif ou d’un passif à la date d’arrêté des comptes. De ce fait, leur comptabilisation ne doit impacter ni le bilan, ni le compte de résultat. En effet, leur comptabilisation a pour simple but de fournir l’information sur l’importance du bénévolat dans l’activité des entités à but non lucratif.
  • Compte de la comptabilité analytique de gestion: L’autre partie de la classe 9 concerne les comptes de la comptabilité analytique de gestion qui sont les mêmes que ceux prévus par le plan comptable du SYSCOHADA.
  • Nature du résultat

Contrairement aux entités à but lucratif, les EBNL ne recherchent pas de profit. Par conséquent, le SYCEBNL qualifie différemment la différence entre les produits et les charges :

  • Excédent: lorsque les produits sont supérieurs aux charges.
  • Déficit: lorsque les produits sont inférieurs aux charges.

Contrairement au SYSCOHADA où on parle de bénéfice et perte.

 

AUTRES OBLIGATIONS PREVUES PAR LE SYCEBNL

L’acte uniforme du SYCEBNL prévoit dans ses articles 17 à 23, trois moyens de contrôle visant à garantir des états financiers sincères, transparents et qui reflètent l’image fidèle de l’entité :

  1. La tenue du registre des donateurs

Les articles 17 et 18 de l’acte uniforme relatif au SYCEBNL établissent l’obligation et les modalités de la tenue du registre des donateurs pour les entités à but non lucratif. Ce registre, essentiel pour assurer la transparence et la traçabilité des ressources reçues, doit contenir des informations détaillées sur les dons et legs, incluant la date, le montant, l’origine des fonds, ainsi que toute condition ou restriction attachée aux dons. Il doit être signé par le représentant légal de l’EBNL, attestant de la véracité et de l’exhaustivité des informations consignées. En outre, le registre doit être coté, paraphé et numéroté de façon continue par une juridiction compétente pour garantir son authenticité et son intégrité, empêchant toute modification non autorisée. Le registre peut être tenu en version physique reliée, ce qui signifie qu’il doit être relié de manière permanente pour éviter toute insertion ou suppression de pages. Alternativement, il peut être tenu en version électronique, à condition que des mesures appropriées soient prises pour garantir sa sécurité et son immuabilité. La tenue rigoureuse du registre des donateurs permet d’assurer la transparence, de faciliter les audits, de renforcer la confiance des donateurs et des bailleurs de fonds, et de prévenir les abus en fournissant une trace claire et détaillée des contributions financières.

  1. La nomination d’un auditeur

Le SYCEBNL fait également obligation à toute EBNL la nomination d’un auditeur qui doit être un expert-comptable inscrit à l’ordre, lorsqu’elle remplit à la clôture de l’exercice l’un des trois (3) critères suivants :

  1. un total du bilan supérieur à cent millions (100.000.000) francs CFA ;
  2. des ressources annuelles supérieures à deux cent millions (200.000.000) francs CFA ;
  3. un effectif permanent supérieur à vingt (20) personnes.

Pour les autres EBNL ne remplissant aucun de ces critères, la nomination de l’auditeur est facultative. Toutefois, elle peut être demandée en justice par au moins 10% des membres de l’entité.

Le rôle de cet auditeur est de tenir informée, l’assemblée générale sur la sincérité et l’image fidèle des informations fournies par l’EBNL.

Ainsi, il se prononce sur la sincérité, la régularité et la représentation de l’image fidèle des informations contenues dans les états financiers. Il présente un rapport, constatant l’existence du registre des donateurs, et donne son avis sur la conformité de sa tenue. De plus, l’auditeur évalue la sincérité et la concordance des informations données dans le rapport d’activité avec les états financiers, assurant ainsi que les informations communiquées aux parties prenantes sont précises et complètes.

  1. Le rapport d’activités

Le rapport d’activités est un document essentiel, établi par les organes d’administration ou de direction de l’EBNL, qui fournit une vue d’ensemble de la situation de l’entité durant l’exercice écoulé. Ce rapport expose non seulement la performance et les réalisations de l’entité, mais aussi ses perspectives de développement et son évolution prévisible. Il inclut également une analyse de l’évolution de la situation de trésorerie, offrant une compréhension complète de la santé financière de l’entité.

En outre, le rapport d’activités doit mentionner les événements importants survenus après la date de clôture de l’exercice, mais avant la date d’établissement du rapport. Ces événements peuvent avoir une incidence significative sur la situation financière de l’entité et sont donc cruciaux pour une évaluation précise et actuelle de l’entité.

L’acte uniforme du SYCEBNL prévoit des sanctions pénales pour les dirigeants qui ne respectent pas l’obligation de préparer et de publier un rapport d’activités conforme aux exigences. Ces sanctions visent à garantir que les dirigeants prennent au sérieux leurs responsabilités de transparence et de communication, afin d’assurer que toutes les parties prenantes disposent d’informations complètes et fiables sur la performance et la situation de l’entité.

CONCLUSION

Le SYCEBNL comble le vide de l’absence de système comptable harmonisé pour les EBNL qui sont exclues du champ d’application de l’AUDCIF 2017.

Désormais, ces entités disposent d’un référentiel comptable clair et fiable, aligné avec les normes internationales, facilitant ainsi la comparabilité intra-sectorielle sur les plans national et international.

Ce référentiel sert d’outil de gestion pour les EBNL dans la mesure où il permet aux responsables d’avoir des informations et des indicateurs financiers fiables et synthétisés à travers les états présentés.

Un tel référentiel est également une assurance pour les bailleurs de fonds quant à l’utilisation des fonds qu’ils mettent à disposition des entités, car, ils ont à leur disposition des informations financières claires, sincères, fiables, contrôlées et surtout intelligibles.

Au vu de ces bienfaits et de l’impératif, les EBNL concernées par cet acte uniforme doivent former leur « producteur » d’état financier à maitriser le plutôt possible ce système comptable pour atteindre l’objectif prévu par le système et atteindre plus globalement leur objectif philanthropique.

Conscient des défis et des complexités associés à la gestion comptable pour les entreprises en général et des EBNL en particulier, le CGP Niger a pris l’initiative de créer une solution innovante et adaptée aux besoins de ses clients. Cette solution se matérialise par le développement du logiciel SOKONNE.

Ce logiciel est une solution informatique complète et performante conçu pour la gestion comptable, la gestion des immobilisations, la gestion des déclarations fiscales et l’édition des états financiers de synthèse. Il est développé conformément aux dispositions de la règlementation comptable et de la législation fiscale actuellement en vigueur au Niger.

En outre, la solution logicielle SOKONNE, conçu par le CGP Niger, prend en compte le SYCEBNL, afin de faciliter la gestion comptable à toutes les catégories d’entreprises.

 

 

WEBOGRAPHIE

BIBLIOGRAPHIE

  • Journal officiel de l’OHADA, (2023), « Acte uniforme relatif au système comptable des entités à but non lucratif ».
  • OHADA, (2023) « Guide pratique ».
  • CLUB OHADA Université de Goma, (2022), « Le nouvel acte uniforme de l’OHADA portant système comptable des entités à but non lucratif ».
  • Journal officiel de l’OHADA, (2017), « AUDCIF & SYSCOHADA ».

Assistant comptable


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